Ces légumes-racines anciens qui sortent de l’oubli

On estime aujourd’hui qu’environ 75 % des variétés comestibles cultivées il y a un siècle ont disparu. Sur la dizaine de milliers de végétaux initialement cultivés depuis la naissance de l’agriculture, seules 150 variétés de plantes nourrissent maintenant la planète. La faute à une agriculture industrielle qui a tendance à privilégier les fruits, légumes et céréales à fort rendement, négligeant ainsi de nombreuses autres variétés de végétaux. (source PNNS)

Un peu d’histoire :

La plupart des légumes anciens et oubliés sont les premiers à avoir été cultivés par l’Homme. Ils appartenaient le plus souvent à la famille des légumes-racines, plus résistants au gel et aux insectes, comme le raifort ou le salsifis dans la Rome Antique, ou le panais base de l’alimentation paysanne au Moyen-âge.
Puis, ces légumes-racines ont été détrônés par l’arrivée de la pomme de terre à la fin du XVIII siècle (originaire du Pérou) dont la culture était plus facile et plus productive, avec de bonnes qualités nutritionnelles.
Ils ont été remis au goût du jour, lors des guerres, les pommes de terre étant réservées à l’alimentation des soldats. Semez des pommes de terre. Pour les soldats. Pour la FranceLors de la Première Guerre Mondiale, le gouvernement français a encouragé les populations à souscrire à l’effort de guerre, comme on peut le voir sur des affiches d’époques :  » Semez des pommes de terre. Pour les soldats. Pour la France. »
C’est pourquoi, des légumes racines, comme le rutabaga ou les topinambours ont très longtemps rappelé de mauvais souvenirs à nos grands-parents, synonymes de guerre et de famines. Ils sont tombés en disgrâce après la Libération. Du coup, notre génération ne les a pas connus et donc n’a pas su comment les cuisiner.
Aujourd’hui, les légumes d’antan s’invitent de plus en plus sur les étals de nos marchés. Cette redécouverte des légumes anciens est surtout due à une remise en question de l’agriculture industrialisée et à une volonté croissante de manger sain et de découvrir de nouvelles saveurs. La tendance est désormais aux aliments plus authentiques. La demande augmentant, les magasins d’alimentation s’y mettent aussi.
On les retrouve aussi sur les cartes des grands chefs cuisiniers, avec des recettes innovantes. Un regret, comme ces légumes reviennent « à la mode » et pas encore cultivés en grande quantité, certains ont un prix assez élevé.
Il faut distinguer les légumes-racines, les légumes-feuilles et les légumes-fruits. Ici, je vais aborder les légumes-racines, ceux que je connais le mieux et que j’ai déjà cuisinés. Plus tard j’aborderai les autres. La liste que je donne ci-dessous n’est pas exhaustive, elle concerne les principaux légumes-racines anciens.
Affiche : Source gallica.bnf.fr / BnF/ Bibliothèque numérique de Rouen

Les légumes-racines anciens

Ce sont les légumes dont nous consommons la partie souterraine. Ce qu’on appelle communément légumes-racines sont plus précisément des « tubercules« . En effet, le tubercule (du latin tuberculum, petite bosse) est l’organe de réserve de la plante. Souvent souterrain, il lui assure sa survie notamment pendant l’hiver. Les organes transformés en tubercules peuvent être : – racine (carotte, panais) – tige souterraine ou rhizome (pommes de terre, crosnes, topinambour) – base de la tige (céleri-rave, navet, rutabaga) ou racine + base de la tige (betterave, radis)

Le panais

Panais

Cultivé depuis le Moyen-âge, c’est celui que je cuisine le plus et depuis longtemps. Il est récolté à partir de septembre-octobre jusqu’en février. Reconnaissable à sa forme proche de la carotte et à sa couleur blanc ivoire, il est parfois surnommé « carotte d’hiver ».
En breton, les taches de rousseur sont appelées pikoù panez, ce qui se traduit littéralement par « taches de panais », car ce légume-racine est constellé de petites taches de couleur son que l’on voit nettement sur sa pulpe blanche.

Préparation : Il se cuisine comme la carotte. On peut le consommer cru, en salade, ou bien cuit, en frites, en purée, en poêlée, en soupe, en ragout, pot au feu, … Il a une texture fondante et une saveur douce, sucrée. Son petit goût de noisette se marie particulièrement bien avec les viandes rôties.

Nutritionnellement :
Le panais est une source de fibres, bonnes pour le transit et qui donnent rapidement la sensation de satiété, ainsi que de vitamines (notamment C, du groupe B et E). Il contient aussi des antioxydants. Il est particulièrement riche en glucides (près de deux fois plus que la carotte). Prudence donc si vous êtes diabétique…

Le cerfeuil tubéreuxCerfeuil tubéreux

Originaire d’Europe Centrale. Il nécessite une culture minutieuse à l’ancienne, où tout est fait à la main pour des rendements faibles (novembre – avril). C’est ce qui justifie son prix assez élevé et il est encore difficile à trouver à la vente. Il ressemble à une petite carotte conique, mais sa chair est blanche.
A ne pas confondre avec le cerfeuil commun, dont on mange les feuilles. On ne consomme que la racine, les feuilles du cerfeuil tubéreux contiennent des alcaloïdes, ce qui les rend toxiques.

Préparation :Le cerfeuil tubéreux possède une chair excellente, sucrée et fondante après cuisson.  Son goût évoque celui de la pomme de terre et de la châtaigne. Il se cuisine comme la carotte ou le topinambour. On peut le consommer cru et râpé, ou cuit, en purée, en pot-au-feu, braisé… Se marie aussi bien avec la viande rouge, le porc, le poulet. En purée avec des coquilles saint jacques …. un bonheur pour les papilles !
Attention à ne pas le faire trop cuire car sa chair risque de devenir farineuse : 5 à 8 min à la vapeur ou à l’eau suffisent.
Nutritionnellement :
Bien qu’il n’existe pas d’étude nutritionnelle précise sur ce légume, on sait qu’il est riche en fibres et en amidon. Il est aussi une source de calcium, de potassium, de magnésium et aussi des vitamine C.

Le topinambour et l’hélianti

TopinambourIls sont tous les deux de la même famille. Originaire d’Amérique du Nord, le topinambour a été largement consommé pendant la Seconde Guerre mondiale, on le cultivait tout au long de l’année même sur les sols pauvres. Puis on la vite oublié car il était trop étroitement associé à la période de guerre.
Le topinambour se récolte de novembre à février. Malgré ses formes un peu tordues, c’est un légume savoureux et sa chair juteuse et sucrée rappelle à la fois le goût de la pomme de terre et de l’artichaut. On l’appelle aussi « artichaut de Jérusalem ».

Préparation :
Un peu long à éplucher, mais il se cuit assez vite. Rôti, poêlé, en purée, à la vapeur ou cuit à l’étouffée, ce légume est à redécouvrir ! Topinambour et Héliani, les goûter …  c’est les adopter.
Nutritionnellement :
Peu calorique, il contient des fibres et affiche un bon rapport potassium/sodium, qui le rend diurétique.
Remarque : Le topinambour peut donner des gaz. Pour éviter cela, les faire cuire avec quelques pomme de terre ou ajouter une petite cuillerée de bicarbonate de soude à l’eau de cuisson.

Le rutabagaRutabaga

Comme le topinambour, il a été largement consommé pendant la Seconde Guerre mondiale, durant laquelle il était la base de l’alimentation…jusqu’à l’écœurement car il faisait partie des rares légumes disponibles. Il a ensuite été oublié en raison de son image associée à celle de la guerre.
C’est un légume-racine de la famille du navet et du radis, facile à cultiver et pas cher. Il est de forme arrondie avec des nuances bicolores jaune et verte. Il semblerait qu’il soit issu du croisement spontané entre un chou frisé et un navet, d’ailleurs sa saveur fait penser aux goûts de « ses deux parents ». Il est rond, peut être assez gros, avec une chair jaune. On l’appelle aussi « chou-navet » quand sa chair est blanche. Il se récolte d’octobre à février.

Préparation :
On le cuisine comme un navet : vapeur, purée, gratin, frites, soupe, soufflé, ragoût … il peut remplacer le panais ou le navet dans les potées et autres plats cuisinés. On peut le déguster cru quand il est jeune. Ses feuilles (fanes) peuvent être cuisinées comme des épinards ou dans les potages.
Nutritionnellement :
Très riche en fibres et en potassium, mais pauvre en calories, il est prisé pour ses vertus diurétiques et légèrement laxatives, c’est l’allié de la digestion ! Il apporte aussi du calcium, du phosphore et du magnésium et de la vitamine C.

Le navet boule d’or

Navets boule d'orLe navet sauvage est certainement l’un des premiers légumes cultivés par l’Homme. C’est durant l’Antiquité que différentes variétés apparurent, parmi lesquelles le navet boule d’or.
Reconnaissable à sa jolie couleur dorée et à sa chair jaune, il est récolté de septembre à février. Contrairement aux autres variétés de navet, il n’est pas du tout amer.

Préparation:
Plus doux et plus sucré que le navet rose et blanc, sa cuisson est plus rapide. Il peut se déguster cru, râpé en vinaigrette. Mais il est bien meilleur cuit. Testez-le en pot au feu de légumes anciens, il révèlera toutes ses saveurs. Pour le faire apprécier des enfants, faites le en frites.
Nutritionnellement :
Le navet boule d’or est un légume pauvre en calories, et riche en minéraux et oligo-éléments, comme la plupart des légumes racines. Il possède aussi des propriétés antioxydantes exceptionnelles. Ses fanes, comestibles, sont une source importante de vitamines C.

Les carottes de couleur

Elles sont cultivées en Europe depuis le XVIe siècle. Leur coloration naturelle est le violet, le jaune et le blanc. Cette dernière était plus utilisée en médecine qu’en cuisine. Les carottes de couleur sont les cousines proches du  panais.Carottes de couleur
La carotte orange telle que nous la connaissons aujourd’hui est apparue bien plus tard, vers le XVIIe siècle, en Hollande. C’est le produit d’un croisement entre les variétés à chaire rouge et à chaire blanche. Sans cette intervention humaine, pas de carotte orange !

Préparation:
Ces étonnantes variétés remises au goût du jour sont très savoureuses. Elles se consomment aussi crues que cuites. Mais à chaque couleur sa spécificité. De préférence cuisinez la carotte blanche poêlée, la violette râpée et la jaune à la vapeur, en soupe ou pot au feu.
Nutritionnellement :
La carotte crue est riche en vitamine A, qu’elle apporte principalement sous forme de bêta-carotène. Le bêta-carotène possède des propriétés anti-oxydantes. C’est lui qui est responsables de la couleur de la carotte. Les carottes violettes en contiendraient 2 fois plus que les carottes orange, tandis que les jaunes en contiendraient très peu et les blanches, pas du tout.
La carotte violette donne l’impression d’être plus sucrée que la carotte orange dont le goût est masqué en raison de ses composés volatils. Cependant, la quantité de glucides totaux dans ces carottes ne diffère pas de façon significative d’une variété de carotte à l’autre.
Les carottes blanches contiennent très peu de vitamine C, contrairement aux carottes orange ou marron, qui en contiendraient le plus. (source J Agric Food Chem. 2001)

Les crosnes

CrosnesOriginaire d’Asie, le crosne se reconnaît facilement à sa forme très particulière : il ressemble à une grosse chenille ! C’est une racine, ou plutôt un rhizome, dont la saveur assez sucrée se rapproche de celui de l’artichaut ou du salsifis. Tout comme le rutabaga, il a été longtemps oublié car il rappelait trop de mauvais souvenirs d’une alimentation de guerre.
Préparation :
Les crosnes se conservent assez mal. les garder dans un torchon humide dans le bas du réfrigérateur … et pas trop longtemps. Les crosnes ne s’épluchent pas. On les frotte avec du gros sel puis on les rince à l’eau courante.
Ils peuvent se consommer crus (marinés dans du vinaigre, comme les cornichons) ou bien cuits à la vapeur, à l’eau, en gratin, braisés…
Nutritionnellement :
Peu calorique car riche en eau (78 % environ), il apporte des protéines, des glucides et des sels minéraux, en particulier du potassium et du phosphore, contenus dans sa peau. Il ne contient pas de lipides.

La betterave Chioggia et la betterave jaune

J’ai mis ensemble ces deux légumes car ils sont très proches, et surtout se complètent bien pour un carpaccio rafraichissant et tout en couleur. On retrouve des traces des principales variétés de betteraves dès le Moyen- Âge.La betterave Chioggia et la betterave jaune
Chioggia : Originaire d’une petite ville côtière d’Italie, en Vénétie, d’où elle tire son nom, elle est aussi bonne que belle, avec sa chair striée rose et blanc très surprenante.
Jaune : Cultivée depuis l’Antiquité pour les vertus médicinales de ses feuilles, elle a ensuite disparue des repas pour revenir à la mode il y a peu de temps.
On les récolte à partir du mois d’août et jusqu’en mars. Attention à ne pas les confondre avec la betterave fourragère qui sert à nourrir le bétail et la betterave sucrière transformée en sucre ou en alcool.
Préparation:
On peut les faire cuire, mais la Chioggia perd sa couleur et son originalité lors de la cuisson. Personnellement, je les préfère crues en carpaccio, avec un filet de citron vert et un peu d’huile d’olive (voir ma recette facile). Elles ont un bonne saveur, un peu sucrée et surtout une très belle présentation. Pensez aussi à en faire des chips, très originales pour les apéros maison.
Nutritionnellement :
Comme les autres légumes-racines, elles sont riches en fibres. L’essentiel de l’apport énergétique des betteraves provient des glucides (d’où leur goût sucré). Elles apportent aussi des minéraux (potassium, magnésium, sodium), des vitamines (A et B9) et des antioxydants.

La pomme de terre Vitelotte

Cette ancienne variété a été importée du Pérou par les espagnols au XVIe siècle. Aujourd’hui on la cultive sur notre sol. Elle est facilement reconnaissable à sa peau et sa chair de couleur violette. Elle est aussi appelée « truffe de Chine ». Cette petite pomme de terre aux formes biscornues offre un rendement faible en termes de culture et se récolte à la fin de l’été. Elle a une saveur très douce et un goût délicat de châtaigne.
Elle est considérée comme ancienne, tout comme la Bleue d’Auvergne, la Bonnotte, l’Early Rose, la patraque ou encore la Fleur de Pêcher. Mais je n’ai pas encore trouvé ni testé ces dernières.
Recette :
Elle se cuisine comme toutes autres pommes de terre, mais il est plus facile de l’éplucher déjà cuite. Sa chair se prête bien à la cuisson en purée, seule ou avec des pommes de terre à chair blanche. Vous pouvez aussi la cuisiner en frites, chips, car elle n’absorbe que très peu de graisses lors de sa cuisson. Sa couleur se conserve à la cuisson.
Nutritionnellement :
Elle est très riche en antioxydants, en glucides et en fibres alimentaires

Les salsifis et les scorsonères

Article à venir. Il faut juste que je me réconcilie avec eux, que j’oublie mes mauvais souvenir de cantine scolaire, que j’en achète un peu et que j’apprenne à les cuisiner.

En exclusivité …. Les coulisses de mes articles

Pour tous mes articles, j’ai la chance d’avoir un assistant photographe de premier choix, Patrick, mon conjoint et complice culinaire. Durant sa vie professionnelle, Patrick a été photographe. Passion qui ne l’a jamais quitté.

Une photo culinaire réussie ne dépend pas tellement du matériel utilisé. Vous pouvez d’ailleurs le constater sur la photo de droite. Par contre il y a plusieurs points très importants :

l’éclairage : pour Patrick, c’est certainement le point le plus important. Les aliments, les plats, seront mis en valeur avec la lumière naturelle, et compléter avec des sources lumineuses, permettant de jouer sur les ombres, les reliefs. A proscrire le flash qui va « aplatir » la photo.

la mise scène et la présentation : il faut que non seulement que l’image colle au texte, mais qu’elle donne envie de le lire. Qu’elle raconte une histoire que vous aurez envie de découvrir.

l’angle de prise de vue : trouver le bon angle, faire plusieurs clichés avec des points de vue légèrement différents. Prendre son temps. Vous verrez le résultat est sans appel, il y aura LA photo qui ne laisse pas indifférent.

la postproduction : Patrick utilise Photoshop et/ou Lightroom pour la retouche photo. Il s’agit surtout de recadrer les images à la taille désirée, parfois gommer une tache ou une miette que j’ai oublié de retirer lors de la prise de vue.

Comme vous le constater, ce site se fait à quatre mains !!

7 commentaires

  1. Monique FAURE

    Merci pour ces commentaires et recettes concernant les « legumes oublies ».

  2. Pierrick le jardinier

    Bravo pour ce site très pro !

    Pierrick le jardinier bio
    Journaliste/ auteur

    • Bonjour Pierrick
      Merci pour votre commentaire, cela fait toujours plaisir à lire !
      Patricia

    • HOUENASSI Eve

      Très intéressant comme informations sur chaque type de légume. Merci.
      Une doléance: sur les viandes ‘noire, rouge, semi;rouge et blanche

  3. Bonsoir j’ai eu des légumes à une amie dedans il y a 1 légumes ont dirai une noix de coco pourriez vous me dire se que c’est svp merci

  4. louisa henkinet

    bonjour attenions si si vous en plantes cela est bien très

    bien et cela est hauteur 1m de haut
    mais un délice

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